BOUILLON DE CUCHA

J’ai commandé un bouillon de cucha, ce poisson dont la bouche est une ventouse qui s’adhère aux roches des ruisseaux. On les pèche aussi pour les exporter aux aquariums de tout le monde. Ils sont les mangeurs d’algues. Et, en Colombie, dans les zones torrides de rivière et de fleuves, les gens mangent ces mangeurs d’algues, histoire d’horreur pour un aquariophile. Voilà un plat succulent et riche en protéines et d’autres vertus miraculeuses.




 —Bon appétit, la serveuse a déposé sur la table une grande assiette creuse et fumante. Si vous mangez ça, elle a repris avec des éclats de rire, vous mettez toutes les chances de votre côté pour vous faire attraper par la manigua!

—Qu’est-ce que vous voulez dire? j’ai fait semblant de ne pas avoir compris l’allusion aux propriétés aphrodisiaques du bouillon. 

—Je pense que vous allez avoir besoin d’une femme! Et là, c’est vous que tomberez tout droit dans un filet! Elle a ricané et est partie.

Je me suis senti ridicule. Même si je ne prétendais pas entamer une histoire plus sérieuse avec cette fille, sa moquerie venait de blesser mon orgueil masculin. J’ai jeté un regard au poisson qui me voyait de ses yeux tristes, sa bouche protubérante et dégonflée. S’était-elle foutue de ma gueule dès le début? Inutile de lui montrer qui j’étais et encore moins d’insister sur des questions plus délicates. Je n’avais plus d’appétit. Heureusement, je savais qui pouvait me donner des réponses et me rehausser un peu la morale. 


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

P

M

Des œufs brouillés avec de l’arepa et du chocolat chaud